Congo-Kinshasa

Honorable Gecoco Mulumba, le héros qui est devenu la cible!
Par Chryso Tambu, publié le 11 avril 2012

La presse congolaise libre est allée vite - alors trop vite - en besogne. Les uns ont ignoré l'honorabilité, le caractère admirable et héroique ainsi que les ramifications de la décision de l'Honorable Gecoco Mulumba de démissionner de l'"Assemblée nationale" - la jungle nationale - et ont conclu, prématurément, que "ce député kabiliste" était "manifestement en mission commandée". Les autres, comme si la pertinence de ses révélations sur l'enrichissement illicite présumé de l'ancien Premier ministre, Adolphe Muzito, était soumise à la contrainte du temps, ont simplement eu tort de lui faire un procès d'intention. Mais qui est réellement Gecoco Mulumba?


"Gecoco", ce muana ya Kingabwa de moins de 50 ans, a un parcours relativement similaire aux Kinois de son âge et qui ont des nobles aspirations. Il a eu le privilège de sortir du pays. Mais mettant en pratique l'"article 15" - débrouillez-vous - , un jargon propre aux Kinois, il a lui aussi recouru à un certain moment au "ngoulounage" (affaire des ngulu) pour lequel il n'en est pas du tout fier; cependant, il en tire satisfaction dans la mesure où cela a permis à plusieurs Congolais d'émiger vers l'Europe - particulièrement la France - où ils ont acquis la nationalité avec tous les droits et privilèges attachés à la citoyenneté et vivent paisiblement et relativement bien dans leur nouvelle patrie.

Malgré certains privilèges que seuls les pays occidentaux offrent, "Gecoco" a choisi de rentrer au pays pour vivre parmi les siens sur le sol de ses ancêtres. Il est mécanicien de profession et gère son propre garage. Compte tenu des conditions de travail très difficiles au Congo, ce jeune entrepreneur se déplace de temps en temps pour l'étranger - particulièrement au Canada - pour acheter ses outils et pièces de rechange dont il a besoin pour la réparation des véhicules. Ce père de famille parvient à nouer très honnêtement les deux bouts du mois avec son business.

Cet ancien mikiliste n'avait aucune ambition pour la politique. Seule sa vocation professionnelle aurait suffi pour faire de lui un membre productif de la société. Mais, les résidants de Kingabwa qui ont trouvé en ce jeune homme un caractère particulier et exceptionnel, certes, rare à un fonctionnaire ont jeté pour lui son chapeau dans l'arène politique à Limete et il a été élu député à l'Assemblée provinciale pour la ville de Kinshasa en 2006 sous le label du PPRD.

Ayant remis à l'arrière plan son entreprise privée, ce député nouvellement élu démontre déjà son indépendance quasi-totale dès le début de sa carrière politique. Il ne suit toujours pas la ligne de conduite de sa famille politique et n'hésite pas à collaborer ou composer avec ses adversaires politiques dans l'intérêt du peuple. Son collègue du parti de Jean-Pierre Bemba Gombo, le Mouvement de Libération du Congo (MLC), l'Honorable William Canon - un Kinois très courageux et très actif qui s'est souvent opposé à l'"ordre de l'imposture" et un "grand-frère" que l'on voit souvent courir des risques à ses côtés depuis 2006 - l'identifie comme courageux, imprévisible, déterminant et indépendant. En effet, on retrouve dans un documentaire de congomikili.com, l'année dernière et bien avant les élections, William Canon venir au secours de son "jeune frère" et collègue "Gecoco" qui s'était interposé pour défendre la cause des sinistrés et sans-abris à Kingabwa et qui a malheureusement été battu et déshabillé par ces mêmes militaires et policiers qui avaient incendié le camp et lui ont ravi par la suite quelques sous, son téléphone et sa montre.

Presque le même scénario s'est encore répété le samedi 7 avril dans ce même camp des sinistrés et sans-abris, sauf que l'Honorable Gecoco Mulumba n'a pas été battu et déshabillé cette fois-ci. Certainement parce qu'il est arrivé trop tard! Profitant de son absence du pays et en séjour à Dubai en Arabie-Séoudite, les autorités de la ville qui n'ont pas pu accomplir leur mission la première fois - l'année dernière - ont dépêché sur les lieux, vers 5 heures du matin, des policiers - certainement des militaires ou milices en tenue de policier - pour mettre tout en feu et faire déguerpir les sinistrés et sans-abris. Tous les responsables de la ville et les députés sélectionnés et nommés - évidemment tous complices de près ou de loin - ayant fait la sourde oreille àux appels de secours des victimes et aussitôt informé de la tragédie, "Gecoco" a immédiatement plié bagage et a pris le tout premier avion pour Kinshasa afin de venir assister et reconforter ces sinistrés et sans-abris qui venaient encore une fois de vivre un cauchemar dans cet endroit qui ressemblait quelques jours avant à un camp de réfugiés abandonnés à eux-mêmes et qui s'est vite transformé en une zone de guerre.

Très visiblement avec les images de congomikili.com diffusées le 10 avril, on peut observer "Gecoco" très ému - les larmes aux yeux - entrain de visiter les lieux et n'en revient pas que les autorités du pays peuvent être toutes animées ou envoûtées par le mal pour commettre un tel crime odieux contre des paisibles citoyens dans le seul but de s'acaparer et de se partager un terrain - un bien sans maître - où le feu président Mzee Laurent Désiré Kabila avait installé ces victimes. Indigné, il s'est exprimé dans la colère et la consternation en s'exclamant: "...l'autorité de l'Etat eza te! Quand je dis ça, nabandi na likolo ti na se et ça n'engage que moi! Mokonzi aza te!..". Et pendant qu'il envisageait des solutions immédiates, il a aussi clairement suggéré une solution ultime au modèle de la Tunisie ou l'Egypte et d'ajouter "...mboka ezo kende na kokufa, il faut bato nionso batelema lelo ndenge Honorable Gecoco atelemi, baloba trop, c'est trop!...".

En toute honnêteté, s'agit-il là vraiment d'une déclaration ou d'un language propre à un individu "manifestement en mission commandée" par le pouvoir en place?

Une parenthèse. Cette réalité tragique confirme le commentaire de Monsieur Shaka Ssali, animateur de l'émission télévisée Straight Talk Africa sur la voix de l'Amérique, lequel faisait observer, à propos de l'amendement - en un temps record - de la constitution tyrannique rédigée à Liège, à son invitée Dr. Faida Mitifu, ambassadeur de la République "Démocratique" du Congo à Washington, en date du 23 novembre 2011 que le système politique au Congo fonctionne comme s'il s'agit d'"un gouvernement de quelques individus, pour quelques individus et par quelques individus".

D'après les témoignages des victimes, tous les sinistrés et sans-abris ont trouvé une parcelle de consolation rien que par la présence de ce jeune député provincial, un leader qui a réagi non pas comme un politicien mais un véritable homme d'Etat. On comprend alors pourquoi la population a imploré son secours, lui, qui se trouvait à des milliers de kilomètres de la RD Congo dans un autre continent!

Ce crime odieux perpétré par le pouvoir et qui fait partie du terrorisme d'Etat a été planifié pour être exécuté en l'absence de "Gecoco" qui pouvait seul constituer un obstacle. Le pouvoir en place en veut à sa tête et cherche à le museler. Et pour atteindre cet objectif, le régime totalitaire et sanguinaire voulait s'assurer que ce jeune leader ne puisse plus jouir de la popularité ou de la légitimité que lui témoigne sa base en particulier et la population en général. Il fallait absolument surtout éviter que ces sinistrés et sans-abris regroupés tous dans un camp ne puissent cogiter et ne deviennent une faction hostile à l'imposture et éventuellement à sa chute. Après tout, ils sont à cinq minutes de la permanence de l'UDPS! Il était donc utile pour le pouvoir de les disperser après avoir déjà interdit aux chrétiens de se réunir au Stade Tata Raphael, lequel est aussi situé trop à "proximité" de la permanence de l'UDPS!

La presse devrait exercer la prudence, la patience et faire preuve d'objectivité!

chryso45@hotmail.com