Monday, November 22, 2021

 

Le Congo-Kinshasa est un Etat-raté!

Par Chryso Tambu, publié le 22 novembre 2021

Contrairement à  ce qui pourrait être considéré comme nouveau concept en matière de “diplomatie internationale” et ce avec la version française de l’article “Manufacturing ‘Failed States’” du professeur Edward S. Herman ne l’est pas en réalité! Le traducteur Dominique Arias a choisi d’interpréter le terme “failed states” en “Etats ratés” lequel n’est pourtant pas le synonyme d’une notion qui plutôt définie un “Etat failli”.  Dominique Arias a tout faux! 

Dans la description sur Amazon de l’ouvrage “La fabrique d’un Etat raté: Essais sur le politique, la corruption morale et la gestion de la barbarie” de Jean Pierre Mbelu, il est écrit “Cet ouvrage traite des réalités politiques, socio-éconimiques et géostratégiques de la République Démocratique du Congo sous le prisme de ce que le pays est devenu depuis les années 1990: celui d’un Etat raté  .” Voilà le résultat d’une conclusion erronée basée sur une interprétation problématique de Dominique Arias! 

Cette réflexion présentée sur Amazon pose déjà  problème dans la mesure où elle attribue le statut d’Etat raté  au Congo-Kinshasa seulement à partir de 1990, c’est à dire 30 ans après son “indépendance” et ce, en lieu et place de celui d’un “Etat failli”. Une évaluation qui aurait constaté  un  échec en rapport avec le statut d’Etat raté aurait dû  être faite en tenant plutôt compte de la date officielle du 30  juin 1960 (le jour de l’”indépendance”) laquelle était supposée aussi coincider avec son accession à la souveraineté. Dépassé cette date, on ne peut alors faire allusion qu’à un “Etat failli”. Or ce pays reconnu officiellement, à tort, comme la “République démocratique du Congo” n’est ni indépendant, ni souverain, ni une république et encore moins une démocratie. Et c’est cette réalité  qui donne tout son sens ou l’associe justement à un Etat-raté  et que l’auteur de ces lignes abordait initialement dans l’article “Honoré  Ngbanda-Nzambo a raison” publié le 5 décembre 2014. 

Mais ce qui pose fondamentalement problème, c’est la traduction par Dominique Arias qui apporte une interprétation différente, voire erronée, de l’idée même de l’article du professeur Edward S. Herman. En fait, Il aurait dû traduire “failed states” par “Etats faillis” ou même “Etats défaillants” et non “Etats ratés”, semant ainsi la confusion dans l’esprit des lecteurs ou analystes francophones dont l’abbé  Jean-Pierre Mbelu. Car, le professeur Edward S. Herman, un amerloque, suggérait, lui, dans son article que “…les Etats-Unis sont devenus un fabricant  à grande  échelle d’Etats faillis”, et non d'après l’interpretrétation de Dominique Arias selon laquelle “…les Etats-Unis devenaient aussi de facto le premier producteur d’Etats ratés, à l’échelle industrielle”. Et le professeur Edward S. Herman d’ajouter: “Par Etat failli, je veux dire un Etat qui a été écrasé  militairement ou rendu ingérable  à cause d’une déstabilisation politique et/ou économique et le chaos qu’il en résulte et n’est pas en mesure (ou il ne lui est pas permis) pendant des longues périodes de se redresser et répondre aux besoins de ses citoyens.” 

Mais Dominique Arias traduit, lui, la version anglaise de la même citation plutôt en ces termes”: “Par Etats ratés, j’entends un Etat qui, après avoir  été écrasé militairement ou rendu ingérable au moyen d’une déstabilisation économique ou politique et du chaos qu’il en résulte, a presque définitivement perdu la capacité (ou le droit) de se reconstruire et de répondre aux attentes légitimes de ses citoyens”, apportant ainsi en plus du sien, c’est à dire le “refus” d’une présomption irréfragable ou droit! 

Il est important de noter que l’expression “Etat failli”, laquelle est souvent évoquée en rapport avec la politique étrangère ou la diplomatie aux Etats Unis d’Amérique, fait allusion en substance à un Etat où “rien ne fonctionne correctement” et que l’Etat “ne parvient pas  à assurer ses missions essentielles”, constatant ainsi un  échec.

Au Congo-Kinshasa, les kinois, eux, disent “Leta (l’Etat) ekufa!”, c’est à dire que l’Etat est quasiment inexistant. Et c’est exactement ce que tente d’élaborer Edward S. Herman dans son article “Managing ‘Failed States’” en pointant du doigt les Etats-Unis d’Amérique qui “sont passés maîtres dans l’art de saper leurs cibles en fomentant le terrorisme intérieurieurement, et puis de leur imputer la responsabilité des crimes commandités par Washington lui-même”, observait cet  éminent et courageux professeur de son vivant! Cet intellectuel ne rappelle-t-il pas aux Congolais un autre, “Vieux H”, feu Honoré    Ngbanda Nzambo ko Atumba? 

Par ailleurs, la description sur Amazon de ce même ouvrage de l’abbé Jean-Pierre Mbelu indique que “la guerre de basse intensité menée par les élites anglo-saxonnes contre le Kongo-Kinshasa depuis l’invasion de l’Alliance des Forces Démocratiques de la Libération (AFDL) en 1996 avait pour objectif de produire un Etat raté  afin de contrôler ses ressources stratégiques ainsi que les coeurs et les esprits de ses habitants”. Encore une fois, Dominique Arias induit Jean Pierre Mbelu à l’erreur avec sa traduction problématique. En fait, le statut d’Etat raté, particulièrement, ne peut être évaluée ou constatée qu’en tenant compte ou à partir d’un point de départ précis de l’histoire, notamment la naissance d’un Etat ou son émancipation (indépendance et/ou souveraineté). Et l’invasion de l’AFDL en 1996 fausse toute référence à un statut d’Etat raté en lieu et place de celui d’“Etat failli” engendré par les décideurs américains! 

In fine, à l’allure où vont les choses, seule une balkanisation - laquelle est d’ailleurs imminente et  facilitée par Félix Tshilombo Tshisekedi - peut sortir le Congo-Kinshasa de son statut d’Etat raté, bien sûr, avec sa disparition de la carte du monde. 

Tala ku tseki, tala ku mamba

chryso45@hotmail.com